Réflexion sur l’efficacité

Dans le domaine de la santé on sait que plus une maladie est diagnostiquée tôt, plus on a de chance de la guérir. En ce qui concerne la justice, la prévention est plus efficace que la répression. D’une manière générale plus on agit en amont, plus on est efficace. Dans le domaine des arts martiaux un des buts à ne pas oublier est quand même l’efficacité. Si l’on applique les principes énoncés plus haut, on essaiera donc d’intervenir le plus tôt possible pour se défendre. Sur le plan technique, rappelons-nous Maître Nocquet qui nous disait qu’il ne doit pas y avoir l’épaisseur d’un cheveu entre l’attaque et la défense. Si l’on a un dixième de retard sur l’attaque, on est déjà en situation périlleuse. Le niveau le plus élevé de la technique étant ce que l’on appelle le « sen no sen » : la parfaite simultanéité entre l’attaque et la défense. Dans le sen no sen, la part du mental est déjà primordiale, mais la technique est encore présente.

Il est possible de remonter encore plus en amont pour avoir une efficacité encore plus grande. A savoir, contrôler non plus le corps du partenaire, mais son mental, de façon à ce que son attaque ne puisse même pas se concrétiser. S’il n’y a plus d’attaque, alors on atteint l’efficacité absolue. C’est pour cela que Maître Nocquet nous disait : « Les meilleurs en aïkido sont ceux qui ne se battent pas ». Rappelez-vous le texte sur la spirale. L’attaque peut être considérée comme une spirale centripète, un voyage de l’abstrait vers le concret. Au départ, l’attaque est dans l’esprit du partenaire, ce n’est qu’une idée. Plus on se rapproche du centre, plus cette idée se concrétise pour laisser place à l’action. Agir le plus tôt possible, c’est donc agir sur le mental et non pas sur le corps. Si l’on attend la confrontation physique l’issue est toujours incertaine.

Agir le plus tôt possible consiste à faire en sorte que l’agresseur n’ait même pas l’idée de vous attaquer.

Et c’est à ce niveau que réside le secret…comment faire pour que l’autre n’ait pas cette idée ? Mais comme c’est un secret, je ne vous le dirai pas, enfin peut être…on verra ça la semaine prochaine.

Les catégories verticales

Il est des évidences qu’il est bon parfois de rappeler…

Une bonne partie de la haine et de l’intolérance que l’on rencontre dans les domaines les plus variés, en particulier les haines raciales, ethniques ou religieuses, les incessantes luttes politiques, provient du fait que l’on raisonne selon ce que j’appelle des catégories verticales. Dans le domaine politique par exemple, cela revient à mettre dans des colonnes juxtaposées les différents partis, pour simplifier, disons une colonne pour la droite, l’autre pour la gauche. Partant de là, si je suis de droite je considère que toutes les personnes figurant dans ma colonne sont dans la référence, et les autres étant bien évidemment l’ennemi qu’il convient de combattre et de vaincre. Et réciproquement. J’ose à peine écrire cela tant cette approche est simpliste, et pourtant c’est ce que nous subissons en France depuis au moins un demi-siècle…On peut tenir le même raisonnement avec les religions : il y a par exemple les Juifs et les Arabes… avec les races : on est noir ou blanc ou jaune, et l’ennemi c’est celui qui n’est pas dans ma catégorie, c’est celui qui est différent. Il y a aussi deux catégories verticales qui depuis quelques décennies sont souvent dans un conflit de ce type, ce sont les femmes et les hommes, mais on peut en trouver bien d’autres, comme les différents groupements d’aïkido pour parler de notre discipline. Les exemples peuvent être trouvés à l’infini. Raisonner selon des catégories verticales présente un avantage, c’est de n’avoir pas trop à se fatiguer pour reconnaître ses amis…Il suffit de regarder le passeport, la carte du parti ou la couleur de peau sans aller chercher plus loin. Il y a un mot pour désigner un tel comportement : Racisme.

Si l’on a un minimum d’honnêteté intellectuelle, on sait parfaitement que la bonne approche est autre. Elle est de faire dans ces colonnes un clivage horizontal, selon la qualité intrinsèque des individus. Dans chacune des colonnes on peut trouver du bon et du moins bon. On ne rejette pas l’autre de manière arbitraire sous prétexte qu’il n’est pas de notre famille. Mais dans chaque colonne on s’enrichit de ce qu’il y a de meilleur. C’est ce que Maître Nocquet appelait la richesse des différences. L’idée est généreuse, mais pas facile à mettre en œuvre, car il faut de grandes qualités d’écoute, de respect de l’autre et de tolérance. On ne peut plus se contenter d’une approche superficielle, rejeter ou accepter en bloc. Il faut regarder vraiment chaque individu en profondeur, pour aller découvrir en lui qui il est vraiment.

Si toutes les intelligences, tous les cœurs purs de toutes les races, de toutes les religions de tous les partis travaillaient ensemble pour le bien de tous, peut-être la vie en ce bas monde aurait-elle un autre aspect. La situation actuelle peut sembler bien triste, mais le jeu n’est pas perdu. Marchons ensemble dans cette voie. Et offrons à nos enfants un monde dont nous pourrons être fiers.

L’agresseur ne réattaque plus

Un comportement courant est de répondre à la violence par la violence. Cette solution aux conflits ne peut être qu’une solution à court terme, car la violence n’engendre que la violence, le désir de revanche, la soif de vengeance. L’aïkido nous offre une élégante façon de sortir de ce cercle vicieux. Il y a dans la technique d’aïkido une exigence élevée et d’une noblesse louable. À savoir que l’on veut se préserver mais pas à n’importe quel prix. L’aïkidoka cherche à préserver sa vie, certes, mais aussi celle de son partenaire. Le mouvement d’aïkido n’est pas une sanction. L’aïkidoka ne juge pas, et son attitude est empreinte du respect de l’autre. La technique, même si elle est assez tonique est toujours appliquée avec compassion. Il se passe alors quelque chose qui peut paraître magique, c’est que l’agresseur ne ressent lors de la réalisation du mouvement aucune agressivité et de ce fait il n’a plus envie de réattaquer. Il est contrôlé, désarmé, mais son attaque n’a pas été bloquée, elle a pu s’exprimer, à la nuance près qu’elle n’a pas atteint sa cible. Ce coup qu’il a porté dans le vide a permis à son agressivité de s’extérioriser, et en même temps lui a fait prendre conscience de l’inutilité de son attaque. Le mouvement de l’aïkido est fait pour transformer le mental de l’agresseur, pour le pacifier, pour retirer en lui l’agressivité.

En cas d’agression dans la rue, une simple esquive suffit parfois à dissuader le partenaire de revenir à l’assaut. J’ai l’exemple d’un de mes élèves qui s’est fait attaquer par quelques personnes, il s’est contenté de faire un randori d’esquives. Les agresseurs, voyant la mobilité de leur cible, et lassés de frapper dans le vide se sont arrêtés spontanément au bout de quelques attaques, et tout s’est fini le mieux du monde : ils ont fait connaissance puis sont allés boire un pot ensemble !

Mais tout ne se passe pas aussi bien. L’aïkidoka a alors toujours l’opportunité de réaliser une projection un peu plus dissuasive, et en cas de besoin il nous reste toujours la possibilité d’immobiliser. Les immobilisations d’aïkido sont redoutables…. Mais il n’est pas toujours nécessaire d’aller jusque là.

La finalité n’est pas de faire tomber le partenaire

Lorsque nous réalisons une technique d’aïkido, nous éprouvons parfois un sentiment d’échec si le partenaire ne tombe pas à la fin du mouvement. En réalité le fait que l’attaquant tombe ou ne tombe pas est sans importance, la vraie question est la suivante : « ai-je été touché ou non ? ». Sincèrement, qu’est-ce que cela peut-il bien changer pour nous que le partenaire soit debout ou au sol à la fin d’une technique ? (Voir le texte de la semaine prochaine). Il est vrai que notre ego est flatté si l’on voit le partenaire au sol, mais cela est une futilité. Un randori effectué uniquement avec des esquives ne satisfera peut-être pas un jury d’examen, mais sur le plan de l’efficacité ne présente rien à redire.

La finalité du mouvement d’aïkido n’est pas la destruction de l’autre, mais la protection de nos deux vies, la sienne et la nôtre. Si l’on travaille dans cet esprit, cela influera sans aucun doute sur la manière de réaliser nos techniques, et nous rapprochera de la manière juste de pratiquer, c’est-à dire sans but, sans désir.

Il est bien évident que le mouvement d’aïkido correctement réalisé conduit le partenaire au sol, mais lorsque le désir d’efficacité est trop présent dans l’esprit du pratiquant, cela le conduit immanquablement à commettre des erreurs : venir saisir trop tôt, se crisper où travailler en force. Le mouvement d’aïkido doit se réaliser comme un petit enfant lâche une balle : à l’insu de sa volonté. Une erreur courante générée par cette volonté de faire tomber est aussi de fixer son regard sur la partie du corps qui va subir la technique au lieu de le porter dans la direction où l’on guide le partenaire.

Les techniques de l’aïkido sont efficaces, très efficaces. Soyons seulement vigilants sur le sens que nous donnons au mot efficacité et au chemin choisi pour y parvenir…

Le sommet de la pyramide

La Connaissance Absolue, celle qui donne toutes les clés de l’univers et de son fonctionnement, qui apporte toutes les réponses aux questions que l’homme se pose depuis la nuit des temps, cette Connaissance Absolue, si elle existe, est unique. Un des buts les plus sages de l’humanité est de découvrir cette Vérité Ultime. Les principaux chemins qui essayent d’y conduire sont les religions et les philosophies.

On peut considérer cette Vérité Ultime comme étant placée au sommet d’une pyramide. Et les chemins constitués par les religions et les philosophies étant représentés chacun par une arête de la pyramide. Si l’on observe cela en restant au niveau du sol, on voit un grand nombre de chemins, tous différents les uns des autres, sans voir où ils débouchent, et l’on peut alors se poser la question de savoir quel est le bon chemin. Mais plus on regarde cette pyramide en prenant de la hauteur, plus on s’aperçoit que les chemins, au fur et à mesure que l’on monte se rapprochent les uns des autres pour finalement converger tous au même point.

L’homme sage, quand il choisit de s’élever emprunte celui des chemins qui lui convient le mieux, en fonction de son éducation, de son origine culturelle ou raciale, et de critères personnels. Et il respecte la démarche de ceux qui choisissent un autre chemin, car il sait qu’en haut, tous se retrouveront.

Mais d’autres, en revanche, pour des motifs qui ne sont pas toujours louables, essayent de convaincre le monde entier que leur chemin est le seul, l’unique voie de salut. Ils utilisent parfois des moyens pacifiques : le porte à porte, deux par deux, par exemple, mais trop souvent des moyens beaucoup plus violents qui génèrent la haine et la guerre. Ce faisant, ils restent au niveau du sol, trop préoccupés qu’ils sont de faire passer tout le monde par leur voie.

Les chemins de montagne ne sont pas des autoroutes, mais des sentiers tortueux, difficiles, étroits, ne laissant passer qu’une personne à la fois, ils sont aussi souvent très beaux. Ce cheminement vers le sommet est un voyage individuel, on peut y être guidé, de même que les guides de haute montagne aident l’alpiniste, mais c’est avant tout l’affaire de chacun dans le silence de son cœur. Respectons donc ceux qui, parce qu’ils sont différents de nous empruntent des voies qui peuvent nous sembler étranges, laissons à autrui le choix de son chemin. Si le chemin est différent, la démarche est similaire, alors respectons les autres dans leurs choix et aimons-les en attendant de se retrouver tous en haut.

 

Rester au centre sans effort

Il y a les choses telles qu’on les rêve, et puis il y a la réalité. Le rêve c’est la maîtrise parfaite, l’équilibre absolu, la sérénité de chaque instant. C’est être ancré au centre de la croix, immuable. Et la réalité est que nous sommes rarement exactement au centre. On pourrait même dire que nous sommes ballottés vers la gauche, la droite, le haut, le bas par les hasards de la vie. Mais pour être positifs, nous dirons que nous voyageons sur cette croix. Or il est bien connu que les voyages forment la jeunesse… Donc lors de ces voyages nous apprenons. Ce qui est une des raisons pour lesquelles nous sommes venus sur la terre. Si nous étions des êtres parfaits, cette situation immobile au centre de la croix nous conviendrait tout à fait, mais nous ne sommes pas encore arrivés à ce niveau, il nous faut apprendre, et c’est dans le mouvement qu’on apprend. Il nous faut en particulier nous enrichir des erreurs que nous commettons.

La vie par définition n’est pas statique, la vie est vibration. Dès que la vibration cesse, la mort est là. Donc rester immobile au centre de la croix serait plutôt mauvais signe… La position immobile dont nous rêvions tout à l’heure n’est pas la vie. La position que nous devons avoir relativement au centre de la croix est une situation de vibration autour de ce centre. C’est cette vibration qui est la manifestation de la Vie en nous. Plus la vibration a une amplitude faible, plus nous sommes proches de la sérénité. La souffrance est là lorsque l’amplitude est trop grande, lorsque nous tombons dans les excès. Elle est proportionnelle  à l’amplitude.

Qu’apprenons-nous lors de ces voyages autour du centre ? On y découvre, entre autres, que lorsqu’on s’écarte du centre, soit une force nous y ramène tout naturellement, soit nous pouvons découvrir là où nous sommes le moyen de revenir vers le centre, il suffit pour cela de rester vivant, à l’écoute, d’accepter la situation que nous vivons. Lorsque le désespoir nous envahit, ou que nous vivons une souffrance importante, on peut lutter, refuser, se débattre, mais on peut aussi l’accepter et ne pas retenir ses larmes. Avez-vous remarqué comment après avoir pleuré de tout son cœur on ressent ensuite comme une libération, un bien être ? Formulez cela comme vous voulez : « après la pluie le beau temps » ou « toute chose contient son contraire ». De la même manière, tout le monde sait que c’est en analysant ses erreurs que l’on peut découvrir des progrès à réaliser.

Prenons un autre exemple. Il nous arrive parfois de notre fait ou non de vivre des situations très pénibles : chômage, décès d’un être cher, peine de cœur, maladie grave. Et dans ces moments-là, on se dit : « je touche le fond ». Cette phrase recèle un espoir, car tant que l’on descend, nos pieds n’ont pas de point d’appui, mais quand on arrive au fond, d’une part on ne descendra pas plus bas, et d’autre part le fond est un point d’appui solide pour se propulser vers le haut. Ce point d’appui nous est donné, il nous faut alors trouver la force en nous de prendre son élan pour remonter. Je ne dis pas que c’est facile, je dis que c’est possible.

 

Devenez l’autre

Maître Nocquet pour nous expliquer comment réaliser une technique nous disait souvent : « Devenez l’autre ». Par ces mots il nous indiquait que dans le mouvement, il faut prendre le centre du partenaire, venir se fondre en lui, avec deux énergies faire une seule. Il n’y a plus deux corps mais un seul. Peut-être avez-vous déjà eu dans votre pratique cette sensation sublime de sentir que le mouvement s’effectue sans que vous ne ressentiez la moindre opposition, sans que vous ne déployiez la moindre force ou ne manifestiez la moindre volonté. Plus de dualité, plus d’attaque ni de défense, ni vainqueur ni vaincu. Quand vous réalisez cela, c’est tout simplement parce que vous avez pris le centre du partenaire, vous êtes un avec lui.

Celui qui vous attaque est bien souvent agressif et en veut au monde entier, il manifeste cette agressivité envers ce qui est extérieur à lui, mais en revanche il y a une personne qu’il ne veut pas détruire, c’est lui-même, d’où l’idée fort judicieuse pour se mettre en sécurité, de devenir lui. Parfois quand je fais cours aux enfants, pour leur faire saisir cette notion sur une attaque, j’esquive et vais me placer juste derrière le partenaire, en me faisant tout petit, comme pour me cacher, et je leur dis : « vous voyez, je me cache dans sa maison, et lui me cherche partout ailleurs… », ou bien je me colle à lui en l’enserrant dans mes bras.

Mais bien sûr, ce qui est le plus beau dans cette phrase et le plus riche d’enseignement, c’est quand on l’adapte au niveau de l’esprit : Si je deviens l’autre, alors de ce fait je vois les choses avec ses yeux, je le comprends, je n’ai plus envie ni de le juger ni de le punir. Mon action alors sera juste, car empreinte du respect de l’autre et de la compassion.

Un enseignement déstabilisant

Une chose est paradoxale…Une grande majorité des hauts gradés de ce début de siècle ont été d’une manière plus ou moins proche des élèves de Maître Nocquet dans les années 60 et 70, j’aurais envie de dire peut-être 90%. Or 30 ans plus tard, il n’en restait plus qu’une poignée se comptant aisément sur les doigts des deux mains… Que s’est-il donc passé entre temps ? La chose est simple…Beaucoup l’ont quitté. Et souvent pour la même raison : tous ceux qui essayaient de COMPRENDRE Maître Nocquet étaient rapidement désorientés. Et quand on sait la prédominance de l’intellect dans notre société occidentale, cette hémorragie n’est pas surprenante. La seule manière d’approcher Maître Nocquet était de l’AIMER. Ouvrir son cœur, ne pas juger, ne pas penser. Le discours de Maître Nocquet était on ne peut plus déstabilisant pour l’esprit, ce qui soit dit en passant est profondément zen. Le Maître n’a-t-il pas écrit un livre dont le titre est «  Zen et aïki ne font qu’un »? Son discours était symbolique, il fallait aller au-delà des mots, et ne pas s’arrêter aux contradictions apparentes, car le Maître était tout à fait capable de vous dire simultanément une chose et son contraire et que les deux choses soient vraies. Et puis, il y avait aussi les mots qu’il disait sans y croire, juste pour se mettre au niveau des élèves…Je me souviens d’un cours dans lequel il nous a expliqué longuement qu’il était très important que la jambe gauche soit devant lors de la projection. Et puis de prendre son uke, de le faire chuter bien consciencieusement avec la jambe gauche devant…et puis accélérer le rythme, danser, virevolter.. et finalement mettre l’autre jambe en avant…Nous étions assis en seiza avec Hervé, et une telle mésaventure nous mettait toujours le cœur en joie, car nous savions bien que pour le Maître le placement des jambes était vraiment sans la moindre importance, mais nous imaginions le désarroi des débutants avides de points de repères !

Une autre raison doit également être citée : C’est que Maître Nocquet n’avait pas son pareil pour maintenir ses ceintures noires dans l’humilité. Combien d’entre elles sont passées seules au milieu du tatami dans un stage international et se sont vu démolir par les réflexions cinglantes du Maître. Maître Nocquet était un redoutable briseur d’ego… Une chose m’a marquée dans mes premières années de pratique, j’avais remarqué à plusieurs reprises que dès qu’un élève arrivait au 3ème dan il se fâchait avec Maître Nocquet. Cela m’intriguait fort, et je voyais arriver la date de mon 3ème dan avec angoisse…heureusement tout s’est bien passé pour moi…enfin presque, car lors de mon examen mon ménisque a lâché, mais ça c’est une autre histoire…

Tenchi nage

La technique de tenchi nage est extrêmement riche en enseignements. Son nom lui même devrait nous faire réfléchir : Projection Terre-Ciel… Voyons quelques enseignements que l’on peut tirer de ce mouvement :

 

1/ La manière de placer les mains au début du mouvement, mains rapprochées, paumes tournées vers le ciel est importante. Ce geste est celui d’une personne qui reçoit un cadeau. Le partenaire n’est pas perçu comme un ennemi, mais au contraire comme un ami qui nous donne un bien précieux : son énergie. Ensuite il faut savoir que la technique s’effectue avec un léger recul du corps, pendant que les mains s’ouvrent de la largeur des épaules. Ce mouvement est un geste d’accueil exactement comme l’on ouvre une porte, puis s’efface pour laisser pénétrer l’autre. Il y a donc dans cette phase préliminaire de tenchi nage une attitude d’écoute, d’ouverture du cœur, d’accueil.

 

2/ Pendant toute la réalisation de la technique, il est important de remarquer que les mains sont toujours exactement à la verticale des pieds. Là encore le message est superbe, si l’on considère que les mains représentent le haut (l’esprit, le Ciel) et que les pieds représentent le bas (le corps, la Terre). Ceci a été dit déjà il y a bien longtemps par Hermès Trismégiste :

« Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut »

Phrase contenant un message immense, source de nombreuses réflexions, et que l’on peut interpréter de nombreuses manières :

Le corps et l’esprit sont une seule et même chose.

L’homme a été créé à l’image de Dieu.

Le Paradis est sur la Terre.

Un livre écrit avec son corps

Maître Ueshiba considérait qu’il avait une mission à remplir : transmettre un message de paix et d’amour au monde entier. Et pourtant il a écrit très peu de livres. Cela peut sembler paradoxal. Et pourtant il a rempli sa mission…Alors…Comment a-t-il procédé ? En réalité il a écrit un livre lisible dans toutes les langues, encore plus efficace que l’Espéranto ! Il a écrit un livre avec son corps ! Son message il l’a placé dans les techniques. Ainsi il s’adresse directement à notre corps sans avoir recours à l’usage de la parole souvent bien aléatoire. Pour celui qui sait lire, chaque technique d’aïkido recèle un message pour notre esprit. Sans entrer dans les détails voici quelques indices, seulement des indices…

Shionage : La spirale de la création, comment l’esprit devient matière.

Iriminage : L’eau : L’énergie qui descend du ciel vers la terre ; autre approche : envelopper le partenaire dans son cœur.

Ikkyo : Le feu : L’énergie qui monte de la Terre vers le Ciel.

Tenchin nage : Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas (similitude de mouvement entre les mains et les pieds). Le corps et l’esprit sont une seule et même chose.

Ude garami : La liane qui tourne autour de l’arbre.

Ces indices pourraient demander plus vaste explication, mais chacun ne peut-il pas en faire sa lecture propre ? Et je ne parle pas du mouvement des mains sur lequel on pourrait disserter longuement…